MOUVEMENT DEMOCRATIQUE SOCIALE ET LAIQUE (MDSL)
  Contribution : du CCDR
 
Contribution : Pour une Algérie de la résistance et du refus

 

Abdelhak Bererhi(*)
Le rideau sur le «pseudo-suspense » est tombé et bien tombé, comme il fallait s’y attendre, avec le show médiatisé de l’annonce de la candidature du chef de l’Etat pour la «course à l’élection présidentielle ».
Un show fastueux dont le coût exorbitant est supporté par le contribuable, même si sponsor il y a. Un gaspillage scandaleux, lorsque l’on songe que pour moins que ça, des cadres sont traduits devant les tribunaux sous le chef d’inculpation de dilapidation et de gaspillage des deniers publics (loi 01.06). Une débauche de moyens alors que le citoyen a le nez dans le panier et que les harraga poursuivent leur course à la mort (600 corps en instance d’incinération en Espagne), pendant que des ballons bleu et blanc voltigeaient dans la coupole de «l’investiture». Le chef de l’Etat s’est déclaré candidat indépendant, écrasant de tout son mépris, comme à son habitude, ses laudateurs, tous partis et organisations confondus.
La fuite en avant

Il clama haut et fort la transparence et la liberté du choix du peuple, alors que tout est verrouillé et préparé pour son élection. S’obstinant à faire de la politique de la réconciliation nationale son cheval de bataille et son premier objectif, en maintenant grandes ouvertes les portes du repentir pour les «égarés». La réponse ne se fit pas attendre avec le terrible attentat à la bombe de Tébessa. Evoquant l’écriture de l’Histoire, il occulta le fait que le pouvoir a toujours confisqué celle-ci à son profit ; un pouvoir qui a cultivé le travestissement de la mémoire (Amirouche, Abane Ramdane, Krim Belkacem…) ; un pouvoir pratiquant la discrimination inadmissible (les obstacles à la commémoration du sacrifice de Maillot et de Fernand Yveton en sont une illustration frappante) ; un pouvoir qui va jusqu’à gommer et profaner la mémoire (le cas des chahids Rahabi en est un exemple éloquent). Alors que l’échec de la politique économique du pays a été avoué par le chef de l’Etat lui-même devant les présidents d’APC réunis, il dresse, aujourd’hui, un bilan «élogieux» et demande qu’on le laisse poursuivre ce qu’il a commencé ! Il annonce un programme de 150 milliards de dollars pour les cinq ans à venir, alors que le prix du pétrole fluctue à la baisse et que la récession mondiale frappe à nos portes ! Refusant de voir la réalité, il poursuit inexorablement sa fuite en avant.

Mascarade et désarroi

En fait, toute cette mascarade pour un troisième mandat a été orchestrée et entretenue des mois durant par les partis de «l’Alliance présidentielle» à qui mieux mieux ; des institutions de l’Etat, dont le Parlement, les ont précédés ou relayés par des déclarations des présidents des deux chambres, le tout couronné par le putsch du 12 novembre 2009. L’Ugta, ainsi que d’autres associations «agréées», agirent en comités de soutien. Le FCE (Forum des chefs d’entreprises), dernier en date, pressé et mettant de côté toutes ses critiques pertinentes concernant la politique économique, clôtura cette véritable supplique pour un troisième mandat. Les ambassades d’Algérie à l’étranger ne furent pas en reste, pour séduire un électorat émigré bien frileux depuis 1995. D’anciens athlètes et des artistes furent grassement payés pour participer à la farce sans parler des pécules versés aux «caravanes» pour un troisième mandat. La corruption joua pleinement, confirmant le peu reluisant classement de l’Algérie dans cette rubrique, parmi tant d’autres. Devant l’absence de candidatures crédibles, une véritable chasse s’engagea, allant jusqu’à accepter un parti nouvellement annoncé et non encore agréé, ouvrant à son président la télévision pour présenter son programme bien avant le lancement de la campagne électorale ! Sans oublier que le chef de l’Etat avait, comme à son habitude, entamé une précampagne dans certaines wilayas «sensibles », malgré son état de santé. Précampagne assumée également par plusieurs ministres, avec des déclarations de soutien frisant l’indécence, avec des bilans et des promesses mirobolants ; le tout assorti, à la veille de «l’investiture », de distribution de logements sociaux à des citoyens en attente depuis de nombreuses années ou de paiements d’arriérés de salaire. Cependant, devant le risque d’un boycott massif, avec un éventail peu reluisant de pitoyables candidats-lièvres, dont beaucoup ne sont motivés que par le pécule promis pour une participation à la mise en scène, ou un recyclage ultérieur, le pouvoir multiplie son activisme pour sortir de sa torpeur un électorat indifférent. Une indifférence qui marque la désaffection, voire le dégoût des citoyens vis-à-vis de la chose politique. Le ton avait été déjà donné lors des élections locales et nationales qui ont connu une désertion éloquente des urnes. Sans parler des zaouïas, l’implication «demandée» aux mosquées, censées être un lieu de culte, pour un appel au vote, en dit long sur le désarroi d’un pouvoir toujours méprisant, et un pouvoir qui reconnaît implicitement par la voix d’un ministre d’Etat que les jeux sont faits, quel que soit le niveau de l’abstention ou du boycott ! La machine électorale s’est mise en marche depuis longtemps ! Par son silence, le chef de l’Etat a alimenté lui-même un faux suspense. Puis, changeant de registre, il reçoit, longuement, une délégation étrangère de troisième ordre pour lui faire des confidences inattendues à ce niveau, provoquant une cacophonie digne d’une république bananière. La succession évoquée au cours de cet entretien illustre la démarche dictatoriale du régime et, de façon éloquente, les méthodes archaïques que l’on retrouve chez les dirigeants des pays arabes qui préparent sans le moindre scrupule leurs dauphins, faisant fi de la volonté populaire. Des responsables qui ont quitté volontairement leur fonction ont fait, comme sûrement beaucoup de patriotes, deux rêves éveillés. Le premier rêve, lorsque le chef de l’Etat se fait hospitaliser en urgence à l’étranger ; sur son lit de malade, ils pensaient qu’il allait peut-être faire son autocritique et que, s’il revenait en Algérie, il changerait complètement de politique ! Il n’en fut malheureusement rien ! Le deuxième rêve était de le voir annoncer, pour faire taire les opportunistes pour un troisième mandat, son départ et préparer des élections libres ! Hélas, la révision constitutionnelle et le show du 12 février 2009 balayèrent ce rêve insensé ! Dommage pour le pays, et dommage pour le candidat président qui aurait pu sortir par la grande porte de l’Histoire.

L’Algérie traverse une grave crise
En fait, dans toute cette agitation et cette frénésie à maintenir le pouvoir en place, l’Algérie traverse l’une de ses plus graves crises politique, économique et sociale. Le diagnostic a été porté de façon pertinente et sans appel à plusieurs reprises par des politologues, économistes sociologues, journalistes, pour ne pas être repris au risque de tomber dans la redondance. Nous ne mettrons en exergue que la fermeture du champ politique, le verrouillage exacerbé des libertés et le glissement vers une dictature qui ne dit pas son nom, avec comme point culminant, le coup d’Etat anticonstitutionnel du 12 novembre 2008. Après ce putsch, ce n’est pas seulement le troisième mandat de Bouteflika qui est concerné, mais surtout l’après-Bouteflika qui se prépare.
La nécessaire convergence des forces patriotiques

L’heure est grave, très grave. Quand on voit le retrait de toute activité politique de certains partis, le jet de l’éponge de plusieurs personnalités (Rédha Malek, entre autres), la désaffection à l’élection présidentielle de candidats crédibles, le désintéressement de l’opinion publique, on ne peut que s’interroger sur l’avenir et la parade à adopter pour faire face à ce «génocide politique démocratique ». Car, il y a bel et bien une crise de l’Etat, de la nation et de la société. Que faire ? Doit-on rester les bras croisés et avouer alors notre impuissance, comme le disent bon nombre de citoyens, ou bien poursuivre la lutte ? Doit-on attendre l’irruption d’un séisme social, l’explosion de la rue, avec ses conséquences imprévisibles dont celles de livrer le pays aux plus grandes dérives ? Cette défiance et ce rejet de toute compromission doivent, au contraire, déboucher sur une action patriotique de sauvegarde de la République et de la Démocratie. Le peuple a toujours rejeté ce système dictatorial par des mouvements citoyens multiples : révoltes estudiantines des années 1960 et 1970, canalisés dans le volontariat, printemps berbère de 1980, Octobre 1988, mouvement des Arouchs en 2001, Tkout, grèves syndicales autonomes, Berriane, explosions sociales… Le pouvoir répondit par le mépris, la matraque et le tribunal ; avec un état d’urgence empêchant tout regroupement ou manifestation pacifiques. En même temps, plusieurs tentatives de rassemblement des forces démocratiques n’aboutirent pas ; elles avortèrent pour plusieurs raisons dont les velléités de leadership. Aujourd’hui, devant l’urgence d’une action commune patriotique, il est du devoir de toutes les forces progressistes qui ont appelé au boycott de faire converger leurs actions pour constituer une sorte de front, un Front de Résistance et de Refus. Au mythe du slogan «l’Algérie forte et sereine», prévaut le symbole de l’Algérie de la résistance contre la dictature et du refus de l’abdication. Ce front pourrait s’élargir à toutes les forces vives de la nation, autour de deux tâches essentielles : d’abord militer et agir pour un boycott actif, pacifique mais déterminé, pour faire du 9 avril une journée de rejet, et du putsch anticonstitutionnel du 12 novembre 2008, et du pouvoir en place qui, malgré des échecs patents ne cherche qu’à se perpétuer ; le boycott est actuellement la seule stratégie pour dénoncer les turpitudes de ce régime. Si l’Inde a inventé la non-violence, l’Algérie a consacré le boycott électoral ! Le boycott dans les conditions actuelles est un acte patriotique sanctionnant et invalidant une parodie électorale, contrairement à ce qu’a dit un haut responsable le qualifiant «d’acte anti-patriotique qui ternit l’image de l’Algérie à l’étranger». Il faudra ensuite engager une réflexion pour une refondation politique avec son corollaire socioéconomique et culturel. Cette refondation pourrait être préparée par une transition démocratique en vue d’une alternative démocratique authentique. Des personnalités et des formations politiques l’ont proposée, comme, du reste, le CCDR l’avait consignée dans le détail, dans son manifeste du 16 avril 2002, pour préparer la consécration d’une vie politique réellement démocratique. Une vraie transition qui ne sera ni celle dévoyée de 1991 ni la parodie de 1999, encore moins la farce et la duperie de 2004. Cette transition doit préparer l’alternative démocratique dans la mesure où les conditions politiques, sociales et économiques ne sont malheureusement guère favorables aujourd’hui pour celle-ci, dans la mesure où les citoyens, rejetant globalement le système qui les a méprisés, risquent d’opter, par mesure de sanction, pour une issue rappelant les sinistres moments qu’à vécus l’Algérie. Désespéré, l’Algérien «votera pour le diable» (selon l’expression populaire), pourvu qu’il se débarrasse de ce système honni ! On doit préparer la voie démocratique par des réformes concrètes, et non pas au nom de la démocratie, l’assassiner, comme a voulu le faire le FIS qui, par la démocratie voulait accéder au pouvoir pour ensuite la déclarer «kofr». Une transition, nécessité pour une issue à la crise, notamment si des évènements exceptionnels venaient à se manifester durant la troisième mandature. Cette transition démocratique, reposant sur une plate-forme d’actions, visera avant tout à rétablir la confiance et à susciter l’espoir au niveau des citoyens, et ce, par une programmation d’actions rapides et palpables tant au plan politique (liberté d’opinion, d’expression, de conscience, libertés syndicales, vie politique plurielle…) que social, économique et culturel (emploi, justice sociale, santé, éducation, agriculture, industrie, banque...). Une telle transition mettra en œuvre finalement, un «projet pour l’Algérie» ; une Algérie républicaine, riche de son Histoire, fière de son algérianité indivisible, avec son amazighité, son islamité et son arabité ; une Algérie démocratique où il y a séparation du politique et du religieux ; une Algérie d’un Etat de droit, où il y a séparation des pouvoirs avec une justice indépendante ; une Algérie de justice sociale, fondée sur la souveraineté du peuple faisant du citoyen la pierre angulaire de la gouvernance ; une Algérie où la jeunesse et la femme, égale de l’homme, jouent un rôle fondamental; une Algérie des valeurs républicaines, des libertés, ouverte sur la modernité et l’universalité. Bref, une transition qui permettra de jeter les bases d’un changement réel. Une fois la confiance et l’espoir rétablis, par la concrétisation des objectifs assignés, dans des délais raisonnables, alors l’alternative démocratique sera possible. Une telle démarche pourrait être consignée dans un manifeste ou un pacte républicain dans lequel se reconnaîtraient toutes les forces vives patriotiques du pays. L’Algérie est à la croisée des chemins. Se rassembler, s’unir, est un impératif patriotique. Il y va de la sauvegarde et de l’avenir de notre pays.
A. B.
(*) Porte-parole du CCDR
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